Chaine fantomatique de montagnes cerclée de hauts barbelés et de miradors, la zone démilitarisée (DMZ) qui sépare la Corée du sud à celle du nord constitue une sorte de paradis terrestre où s’épanouissent – à l’abri de la civilisation – faune et flore. Interdite à l’Homme depuis 1953, cette bande de terre qui court sur une surface de 249 km de long sur 4 km de large est devenue le refuge d’espèces animales et végétales en voie de disparition.
Matérialisation schizophrène du traumatisme coréen d’après-guerre, ce no man’s land hétérotopique est au coeur de la série de peinture « between red » de l’artiste Sea Hyun Lee dont le thème de la disparition constitue le stigmate, et la mélancolie, la névrose.
Dans des teintes chromatiques rouges, l’artiste coréen peint des paysages personnels inspirés de la Zone démilitarisée en combinant des éléments des montagnes de la Corée du sud et du nord. A la manière des peintures chinoises où se mêlent différents points de vue et souvenirs, Sea Hyun Lee utilise un mode de composition proche du collage. Il construit et déconstruit les panoramas, remanie des fragments de montagnes, associe des parcelles de terrains, champs et forêts. Il ordonne des mondes clos et idéaux qui impliquent, par leur caractère fragmenté et fissuré, leur propre impossibilité. Les ilots hyper détaillés au contour précis semblent glisser comme des nuages éphémères dans les méandres blancs de la toile.
Si la dimension politique du travail de l’artiste coréen Sea Hyun Lee semble évidente une fois énoncée, l’ensemble de la série « Between red » impressionne avant tout par sa beauté et sa cohérence qui cristallise en une œuvre esthétiquement frappante le traumatisme humain de la disparition.
Né en 1967 sur l’ile de Geogje en Corée du Sud, l’artiste Sea Hyun Lee vit et travaille à Londres où il est représenté par la galerie Union.