Editrice de magazine, Momomi a fondé avec son mari Iro la librairie Your Mind à Seoul. Amour pour le verbe, passion pour la photographie. A la manière dont certains cherchent le mot juste, la phrase parfaite, Momomi photographie des choses, des instants. La lumière en plus. Moment de poésie furtif, rêve effacé, elle capture le temps qui passe, suspend le cours du temps, révèle la poésie du monde.
Les poissons sont de l’eau à l’état solide.
Les oiseaux sont du vent à l’état solide.
Les livres sont du silence à l’état solide.
Pascal Quignard
interview
En regardant vos photos, j’imagine une enfance calme et sensible. Quand avez-vous décidé de devenir photographe ?
Enfant, j’étais loin d’être calme et sensible. Je sortais jusqu’à tard avec mes amis du quartier si bien que ma mère devait toujours venir me chercher. Mes parents s’inquiétaient parce que j’étais comme un garçon. Je préférais construire des maquettes de voiture plutôt que jouer à la poupée comme la plupart des filles. Jusqu’à mes 30 ans j’étais quelqu’un d’assez désordonné.
Puis je suis tombée malade. Ca a été une période difficile aussi bien physiquement que moralement. Je suis devenue plus réservée et plus calme.
Quand j’étais petite, je voulais devenir peintre. Je pensais avoir du talent car je dessinais bien et tout le monde me faisait des compliments. J’ai même remporté quelques prix, mais c’était des prix mineurs.
J’ai commencé la photo à l’age de 25 ans et ca fait maintenant 3-4 ans que j’en fais sérieusement.
Quelles sont selon vous les qualités pour être photographe ?
La patience.
Pouvez-vous nous raconter une anecdote concernant l’une de vos photos ?
Un jour, lors d’un voyage à Paris, je photographiais à travers la fenêtre d’une maison qui semblait abandonnée quand soudain un homme a ouvert la fenêtre et a sorti sa tête. J’étais sur le point de m’excuser, car je pensais qu’il était fâché, mais contre toute attente, il m’a invité à prendre des photos librement. C’était un collectionneur d’objets anciens et on s’est mis à parler ensemble.
J’ai utilisé la photo que j’ai prise ce jour-là comme couverture du livre d’essai que j’ai publié. Un jour, quand je retournerai à Paris, j’aimerais lui offrir le livre.
Qu’est-ce qui vous inspire ?
Les écrits. Un mot ou une phrase plutôt qu’une l’histoire. Je lis beaucoup de romans et de poèmes. Je pense que la poésie et la photo se ressemblent par leur caractère implicite.
Selon vous, quel est l’instant idéal pour une photographie réussie ?
Quand les choses qui ne bougent pas se mettent à bouger et quand les choses qui bougent deviennent immobiles.
Vous tenez la librairie YOUR MIND avec votre mari Iro. Avez-vous envie de publier votre propre magazine ?
J’aurai aimé faire des magazines, mais je pense que c’est au-delà de mes capacités. Le magazine est un objet complexe. Il faut à la fois maitriser les images, les textes et le design. En revanche, je pense publier, l’année prochaine, un livre de photographie avec des designers et des photographes qui ne sont pas encore connus.
Un dernier mot sur Seoul ?
Séoul est une ville où coexistent l’ancien et le moderne. Mais sûrement dans une dizaine d’années, les choses modernes vont prendre le pas sur les traditions qui vont disparaître peu à peu. La politique actuelle de Séoul pointe plutôt vers le développement que la conservation. Ce que je regrette.
J’aime bien me promener au jardin d’hiver quand il pleut. Je me sens bien quand je regarde les plantes au son de la pluie.