Intime, sensible et naturel. C’est en ces termes que Kim et Lim présentent les produits du studio oakwood, le bureau de design qu’ils ont fondé en 2011. Les deux jeunes designers coréens fabriquent des meubles en utilisant uniquement le bois de chêne, matériaux qui leur permet de faire rentrer un morceau de nature dans les maisons.
Ils travaillent beaucoup, 10h par jour. Leur but est de fabriquer des meubles qui peuvent contenir les histoires personnelles et la trace du temps qui passe. A la place du crime ornemental, ils se libèrent du superflu et misent sur le minimalisme, l’épure esthétique de la forme géométrique. L’ombre et la lumière font le reste.
INTERVIEW
Cahier de Seoul : Quel type d’espace souhaitez-vous créer ?
Oakwood studio : Nous voulons fabriquer des espaces où le meuble soit au service de son propriétaire et non le contraire. Souvent, nous rencontrons des personnes esclaves de leur mobilier.
Que faisiez-vous avant ?
Lim : J’ai suivi des études d’espagnol à l’université et en même temps, je faisais déja de la menuiserie.
Kim : J’ai étudié la foresterie et dans ce cadre, j’allais souvent à la montagne.
Comment vous êtes vous rencontrés ?
Kim : Nous nous sommes rencontrés dans un atelier de meuble situé à Bundang. Lim travaillait dans cet atelier. Quand j’ai obtenu mon diplôme, il m’a proposé de travailler avec lui.
Qu’est ce qui vous a décidé à monter ce bureau de design ensemble ?
Nous avions la même approche du design et un but identique : fabriquer des meubles qui amélioreraient la vie des gens. Puis nous nous faisons mutuellement et instinctivement confiance.
Pouvez vous nous parler de votre premier client ?
C’était un Monsieur qui habitait dans un appartement situé à Daejon. Nous avons transporté le meuble chez lui. J’ai demandé où poser le meuble et il a répondu « dans salon ». Le salon était une pièce vide sans meuble ni appareil électrique. Seulement quelques céramiques étaient disposées par terre. Alors nous avons posé le meuble au milieu de la pièce à coté de quelques céramiques. Ensuite nous avons bu du thé ensemble. Je me sentais bien en rentrant.
Vous travaillez uniquement le chêne. Qu’est ce qui vous plaît dans ce bois ?
C’est un matériau qui capte bien la trace du temps qui passe. La ronce du chêne est bien marquée. L’utilisation de l’huile naturelle permet de bien conserver sa couleur malgré le vieillissement. L’été dernier, nous avons mis un meuble en dépôt dans un magasin de design. A ce moment, sa teinte ne nous plaisait pas vraiment. Un an plus tard, nous l’avons ramené dans notre atelier. Sa texture s’était adoucie et sa couleur avait pris une teinte dorée. Comme il a été manipulé sans attention particulière pendant 1 an, il a muri. Quand on l’a récupéré, ce meuble dégageait une sensation agréable. On pouvait y sentir la profondeur du temps.
Les meubles traditionnels coréens vous inspirent ?
Bien sûr. En particulier, les meubles datant de la seconde moitié de l’époque Chosun (1392-1910). Quand je regarde les meubles traditionnels, j’ai le souffle coupé par leur esprit et leur intelligence. Je voudrais reproduire ces éléments mais sans faire une simple imitation.
Que faites vous de votre temps libre ?
Nous discutons beaucoup et partageons nos idées. On cherche maintenant à définir un style vraiment propre à notre studio.
A part ça, nous nous promenons, allons à des expositions et lisons.
Voyagez-vous souvent ? Quel est l’endroit qui vous a le plus marqué ?
Lim – Je suis parti un jour à Incheon avec mes amis. Nous avons pris un bateau pour aller sur une île qui s’appelle Seongbongdo. De là, nous avons pris un autre bateau – de pecheur cette fois – pour aller sur une petite île ‘Saseongbong’.
Nous avons installé une tente, allumé un feu de camps autour duquel nous avons bu de l’alcool. Plus tard dans la nuit, pendant que l’on dormait, il y’a eu une violente tempête qui a soulevé la tente. Les vêtements et les sacs étaient trempés. On a attendu en pleurant jusqu’à 14h le lendemain. Ce n’était pas un voyage magnifique, mais il est inoubliable.
Kim – Après mon mariage, je suis parti en voyage pendant 4 mois avec ma femme. Nous sommes allé au Népal, et la ville Pocara reste gravé dans mon cœur. Habituellement, c’est un endroit où les voyageurs passent juste pour faire de la randonnée à Annapourna. Mais comme nous avons aimé cet endroit, on y est resté pendant 2 semaines. On se promenait autour du lac Pewa, on buvait du thé à l’auberge en lisant des livres. C’est l’un des seuls moments de ma vie pendant lequel j’étais complètement serein. J’aimerais bien y retourner.
Quelle musique écoutez vous ?
Quand on travaille dans l’atelier, nous mettons un casque pour nous protéger du bruit. Mais la radio reste tout le temps allumée sur CBS 93.9. La nuit, nous n’utilisons pas les machines et nous consacrons au travail de cirage. On écoute alors l’émission « Entre rêve et musique de Heo Yoon-hi ».
Quel est votre quartier préféré à Séoul?
Mangu-dong. Le quartier où notre atelier est situé. J’aime beaucoup ce quartier. La forêt de Jungrang est en endroit formidable. On a du mal à imaginer qu’à Séoul il existe ce genre d’espace. Pendant le travail ou après, on y va pour prendre l’air, s’aérer, se vider l’esprit, penser à autre chose. Beaucoup de gens pensent qu’il n’y a que des cimetières la-bas, mais ce n’est pas du tout un quartier morbide. Mang-u : Mang signifie oublier, U signifie le souci, son nom signifie « oublier ses soucis ».
@Cahier de Seoul