Artistes-sculpteurs coréens contemporains.
Ce qui caractérise une partie des artistes coréens qui émergent sur la scène internationale, réside dans l’adéquation remarquable et la pertinence des médiums choisis par rapport aux thématiques abordées, ainsi que dans l’exceptionnelle maîtrise technique qu’ils démontrent. À travers l’utilisation de produits manufacturés ou bruts, leurs œuvres impressionnent aussi bien sur le fond que sur la forme. L’artiste Do Ho Suh reconstitue des architectures issues de ses souvenirs avec du tissu d’organza. L’artiste Seo Young Deok, assemble minutieusement des chaines metalliques pour représenter des personnages en souffrance. Yun-Woo Choi crée des sculptures avec des pages de magazine et de livre qu’il découpe, plie et enroule. Dans une démarche moins conceptuelle et plus spirituelle, Lee Jaehyo utilise du bois et des pierres pour fabriquer des sculptures abstraites en harmonie avec la nature. Il est intéressant de faire un parallèle entre ces jeunes artistes (à l’excepté de Lee Jaehyo) avec le premier artiste coréen majeur connu internationalement qui était Nam June Paik et qui utilisait des téléviseurs pour faire des sculptures. Pour lui, la télévision était à la fois un symbole riche de sens et constituait aussi un matériau avec lequel il composait.
Designers/créateurs coréens
Chez les designers coréens, le choix du matériau est également central couplé avec un intérêt pour les techniques artisanales traditionnelles. Sans se spécialiser dans une technique particulière, ces jeunes créateurs utilisent les techniques en fonction du matériau qu’ils souhaitent travailler (ils font régulièrement appel à des artisans spécialisés pour réaliser les pièces qu’ils ont imaginé). Leur démarche consiste à réutiliser un savoir-faire ancestral, une solidité et une résistance pour créer des produits plus adaptés à la vie quotidienne et aux tendances esthétiques.
Le Patrimoine culturel coréen
Au-delà de cet aspect pratique, on constate une volonté chez les jeunes créateurs de pérenniser les techniques traditionnelles qui tendent à disparaitre au profit de nouveaux matériaux et de nouveaux moyens de production. Cette volonté est soutenue par l’état qui, dans un souci de sauvegarder la culture coréenne, a mis en place en 1962 des lois visant a protéger, outre les biens culturels matériels, des activités culturelles traditionnelles en les déclarant trésors culturels immatériels. La Corée possède en effet un patrimoine culturel riche qu’elle forge depuis 5000 ans et qui porte en lui ses caractéristiques historico géographiques.
L’approche tradition-modernité des artistes coréens
À l’instar de certains artistes, les créateurs utilisent des techniques artisanales et des matériaux traditionnels, car ils portent en eux le caractère coréen, donc leur identité, tout en souhaitant les moderniser et les adapter à des problématiques contemporaines. Ce qui change donc, ce n’est plus la technique, mais leur utilisation.
À cet égard, le travail de l’artiste contemporaine Yee Sookyung est représentatif dans le sens ou elle reconstruit quelque chose de neuf à partir d’éléments anciens. Son travail de sculpture consiste en la récupération de chutes de céramique de maitre (porcelaine Joseon, celadon, etc) qu’elle réassemble pour fabriquer des nouvelles formes hybrides.
L’artiste Do Ho Suh a utilisé du tissu d’organza pour construire des architectures fantomatiques aux parois colorées et translucides, engageant une réflexion sur la mémoire, la maison et l’exil. Le tissu d’organza est utilisé à l’origine pour la confection des hanboks, l’habit traditionnel coréen.
L’artiste Kim Sooja, utilise les bottaris, des grandes pièces de tissus traditionnels et colorés confectionnés à partir de morceaux d’étoffes récupérés et cousus entre eux, comme objets symboliques, métaphores du voyage et du déracinement. Traditionnellement, les bottaris étaient utilisés à la manière de grand baluchon pour envelopper et transporter des effets personnels lors de voyage et de déménagement.
Le designer Gio Kisang a réinterprété la vaisselle traditionnelle coréenne en bronze Yugi afin de la rendre plus accessible à un usage quotidien. Bien que profondément ancrée dans la société coréenne cette vaisselle était peu adapté à la vie moderne en raison de son poids et de son encombrement.
Le designer Kwangho Lee, dans sa série New Armor, a utilisé une technique traditionnelle de laquage employée pour la fabrication d’armure pendant la dynastie Joseon (1392-1897), afin de fabriquer des meubles (chaise, fauteuil).
Le rapport avec les matériaux :
Les jeunes designers coréens, plutôt que de se spécialiser dans une technique et dans un seul médium, préfère le mélange, expérimentent les combinaisons de matériaux, de texture afin de trouver des harmonies nouvelles, des jeux de tension, d’énergie et d’équilibre.
Outre sa série « New Armor », Kwangho Lee travaille beaucoup avec des matériaux industriels comme le PVC, le plastique et le Polystyrène. Jeonghwa Seo utilise quant à lui, des matériaux bruts. Dans la série « material container », il a imaginé une collection de tabourets en combinant pour chaque pièce, deux matériaux. Il a utilisé en tout deux types de pierre, cinq types de bois et trois types de métaux.
Dans une démarche proche du Land Art et de l’Arte povera, L’artiste Lee Jaehyo travaille avec les médiums qu’il peut trouver autour de lui. Le bois et la pierre dans la forêt qui l’entoure et les clous dans les ateliers. Dans une sorte d’énergie collective, il se fait aider par les artisans de son village.
En parallèle du travail de Lee Jaehyo, le travail de certains céramistes se rapproche du travail d’artiste en faisant le pont entre l’homme et la nature. Dodamyo construit des céramiques à partir de pigments et de terres qu’elle trouve dans la montagne autour de chez elle. Ses céramiques aux formes informelles et à la ligne irrégulière illustrent cette notion selon laquelle les objets fabriqués doivent être imparfaits pour démontrer leur impermanence, à l’image de notre propre vie.
Pour en finir avec la céramique, l’une des différences entre la céramique coréenne par rapport a la poterie française, c’est que la céramique coréenne laisse la trace des doigts de celui qui les a modeler, tandis que la poterie française lisse tout.
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